L'intelligence artificielle remplacera-t-elle les psys ?
- mathieuderossi2
- 11 juin
- 8 min de lecture
Dernière mise à jour : 26 nov.

Introduction
Avec l’essor de l’intelligence artificielle dans le domaine de la santé mentale, une question revient souvent : les IA vont-elles remplacer les psychologues ?
Cette évolution technologique fait naître des interrogations légitimes, partagées par les professionnels de l’accompagnement, les patients, et plus largement, tous ceux qui s’intéressent à la qualité de la relation thérapeutique.
Avant de créer Hello Palo, nous nous sommes nous aussi posé la question : pourquoi introduire une intelligence artificielle dans un champ aussi sensible, et comment s'y prendre pour ne pas affaiblir ce qui en fait la richesse ?
Nous sommes arrivés à la conviction que cette opposition entre humain et IA est une fausse piste. Les deux n’ont pas vocation à se remplacer, mais à se compléter. L’un n’est pas supérieur à l’autre, ils répondent à des besoins différents.
Cet article explore ce que chacun peut apporter, ce qui les distingue, et pourquoi leur complémentarité représente une opportunité pour renforcer la qualité et l’accessibilité de l’accompagnement en santé mentale.
Ce que l’IA peut apporter à la santé mentale
Libérer la parole et briser les tabous
Alors qu’il peut être difficile ou intimidant de se confier à un thérapeute ou à un coach, l’intelligence artificielle permet d’abolir la barrière de la timidité et de se livrer plus facilement. Parler de ses difficultés psychologiques reste en effet délicat : 3 Français sur 4 déclarent craindre de consulter un psychologue, et 87 % préfèrent même ne pas parler de leurs troubles à leur famille (Source : YouGov). Une IA conversationnelle peut se comparer à un journal intime interactif. Elle crée un espace de parole confidentiel favorisant le lâcher-prise, elle ne juge pas, elle écoute et guide.
Ce cadre facilite aussi une plus grande sincérité : Dans une étude menée en 2015 auprès de plus de 500 patients suivant une thérapie, plus de 90 % reconnaissaient avoir menti au moins une fois à leur thérapeute (Source : Counselling Psychology Quarterly), souvent par gêne ou par crainte d’être mal compris. Dans ce contexte, l’IA peut devenir un espace plus franc, où l’absence d’un regard humain permet une parole plus libre et parfois plus authentique.
Des études récentes confirment d’ailleurs que l’IA peut être perçue comme particulièrement empathique. Dans une expérience menée à l’aveugle auprès de 556 participants, les réponses générées par une IA ont été jugées 16 % plus compatissantes que celles produites par des humains, et préférées dans 68 % des cas (Source : Communication Psychology). Ces résultats suggèrent que l’IA peut répondre de manière crédible à un besoin croissant de soutien émotionnel, notamment dans des contextes où l’expression sans jugement est primordiale.
Un appui disponible à tout moment
Contrairement aux consultations humaines qui nécessitent souvent de prendre rendez-vous plusieurs jours à l'avance, avec un délai moyen d'attente de 9 jours en France pour obtenir un premier rendez-vous (Source : Fondation Fondamental), une IA spécialisée est immédiatement disponible, 24h/24 et 7j/7. Elle permet ainsi aux utilisateurs d'exprimer leurs difficultés au moment où ils en ressentent le besoin, sans attendre, sans interruption, et sans dépendre de créneaux horaires restreints.
Cette disponibilité permanente est particulièrement précieuse dans les moments de fragilité, où un besoin d'écoute peut survenir de manière imprévisible, en soirée, le week-end ou durant des périodes de stress intense.
Rendre l’accompagnement plus abordable
Le mal-être psychologique coûte en moyenne 3 000 euros par salarié et par an aux entreprises (Source : Deloitte), entre absentéisme, turnover et désengagement. Ce chiffre grimpe d’autant plus que les troubles psychiques représentent désormais 28 % des arrêts maladie de longue durée en France (Source : DARES). Face à cette réalité, l’IA ne remplace pas les psychologues : elle intervient là où les professionnels ne suffisent plus. Elle permet de proposer un soutien immédiat, à grande échelle, en agissant comme un filet de sécurité psychologique pour celles et ceux qui n’auraient pas accès à un professionnel ou n’oseraient pas franchir le pas. Sur le plan individuel, le frein économique existe également : une séance avec un psychologue coûte en moyenne 64 euros (Source : Observatoire de la psychologie), et peut atteindre 95 € dans certaines régions (Source : psychologue.net). À l’inverse, les solutions intelligentes permettent de proposer un accompagnement plus accessible, tant en termes de prix que de disponibilité, notamment pour des personnes éloignées du soin classique.
L’IA peut suffire pour déclencher un changement
L’IA peut offrir un premier niveau d’accompagnement, aider à formuler un mal-être. Et ce premier niveau peut suffire pour résoudre un blocage. Certaines personnes trouvent, dans l’échange avec une IA spécialisée, les repères, les prises de conscience et les exercices nécessaires pour sortir d’une impasse. Dans ces cas, l’IA ne joue pas un simple rôle d’introduction : elle peut suffire à initier un véritable changement. Et ce n’est pas marginal. Beaucoup de personnes qui utilisent ces solutions n’auraient de toute façon pas franchi la porte d’un cabinet. En France, seuls 7 % des Français suivent ou ont déjà suivi une psychothérapie (Source : Haut Conseil de la Santé Publique). L’IA vient donc combler un besoin jusque-là non couvert, en offrant un point d’appui concret et structuré, sans nécessairement passer par un suivi humain.
Le choix du bon interlocuteur dépend du besoin initial
La pertinence d’un recours à un thérapeute humain ou à une IA dépend avant tout de la nature du besoin initial. Certaines personnes souhaitent avant tout comprendre ce qui les bloque, identifier des logiques dysfonctionnelles, ou bien tester de nouvelles façons d’agir face à une situation. Dans ces cas-là, le besoin n’est pas nécessairement relationnel ou affectif : il est pragmatique, tourné vers la résolution.
Une IA spécialisée peut alors suffire. Elle guide, cadre, propose des tâches concrètes ; et cela peut être exactement ce dont la personne a besoin. Autrement dit, on ne vient pas toujours chercher une oreille, parfois on vient chercher une boussole. Cette approche n’exclut pas l’accompagnement humain, mais elle montre qu’il existe des formes d’aide où le lien humain n’est pas central, sans que l’efficacité en pâtisse.
Une approche encadrée de l'IA pour prévenir les usages excessifs
Comme tout outil relationnel, une IA peut susciter un attachement fort, voire une forme de dépendance affective. Chez Hello Palo, nous intégrons des mécanismes de régulation, notamment : une durée de session limitée, des incitations à la prise de recul et des rappels à l’autonomie. L’objectif est d’éviter toute forme d’usage excessif et de maintenir une posture d’accompagnement ponctuel et ciblé.
La valeur irremplaçable du lien humain
Parfois, seule la présence humaine peut apaiser
Dans les situations de détresse émotionnelle profonde ou lorsque l'accompagnement vise principalement un besoin de présence, le lien humain reste essentiel. Il arrive que seule la présence d’un autre être humain capable d’écoute et de résonance émotionnelle puisse apaiser une souffrance. Dans ces cas, l’alliance thérapeutique humaine est le levier principal du changement. Le professionnel intervient dans les situations où le lien, la relation et l’expertise clinique sont au cœur du processus. Ainsi, chacun intervient à l’endroit où il est le plus utile, selon les besoins spécifiques de la personne accompagnée.
Un thérapeute sait capter l’invisible
Un thérapeute humain sait aussi capter des micro-signaux émotionnels ou corporels, parfois invisibles dans une simple conversation écrite ou verbale. Il peut contenir des émotions très fortes, accompagner des traumatismes complexes. Enfin, au-delà des mots, il sait utiliser les silences, le regard, la posture, pour renforcer la sécurité et la confiance.
Quand la détresse psychique nécessite une prise en charge médicale
Certaines situations dépassent le champ de la santé mentale courante et relèvent d’une prise en charge médicale spécialisée. Les troubles psychiatriques sévères comme les états dépressifs majeurs, les troubles bipolaires, les psychoses ou les idées suicidaires nécessitent une évaluation clinique rigoureuse pouvant mener à un traitement médicamenteux ou à une hospitalisation. Dans ces cas, seul un professionnel de santé habilité, comme un psychiatre, peut intervenir efficacement.
L’intelligence artificielle, aussi performante soit-elle en accompagnement conversationnel, n’a pas la capacité de diagnostiquer un trouble psychiatrique, ni celle de mettre en place une stratégie de soins adaptée. L’humain reste donc indispensable pour poser un diagnostic et apporter un soutien thérapeutique adapté aux situations complexes.
L’IA, ce n’est pas (que) ChatGPT !
Une IA conçue avec des thérapeutes : un gage de qualité
Contrairement aux IA généralistes comme ChatGPT, conçues pour répondre à toutes sortes de sujets, une IA spécialisée en santé mentale suit un protocole précis. Elle est entraînée sur une méthode thérapeutique définie, comme celle de Palo Alto, et encadrée par des professionnels. Elle ne propose pas de réponses libres, mais une progression guidée : compréhension du problème, identification des émotions, propositions d’actions. Cette rigueur garantit la sécurité, la cohérence, et le respect de la personne. Par ailleurs, « trouver des solutions à ses problèmes personnels » figure aujourd’hui parmi les premiers usages des IA génératives (Source : IPSOS). Ce besoin réel impose une exigence forte : proposer des solutions qui soient fiables, sécurisées et réellement bénéfiques pour les utilisateurs.
Une IA spécialisée agit ainsi dans un cadre clair et limité, à la différence d’une IA généraliste qui peut manquer de fiabilité sur ces enjeux sensibles.
Quand l’IA apporte de nouveaux patients aux thérapeutes
Contrairement à une idée reçue, les IA thérapeutiques ne viennent pas concurrencer les psychologues humains, mais peuvent au contraire renforcer leur activité. Lorsqu'elles proposent une mise en relation avec un professionnel, loin de les remplacer, elles facilitent l’accès à la consultation. Elles agissent comme des dispositifs d’aiguillage, orientant des utilisateurs souvent plus conscients de leur problématique, parfois même déjà engagés dans une première réflexion, vers un suivi thérapeutique humain. Cette dynamique permet aux psychologues d’accompagner des personnes déjà dans une posture active de changement. Ainsi, les IA thérapeutiques qui permettent de mettre en relation les utilisateurs avec des thérapeutes humains ne les remplacent pas : elles participent activement à leur activité en facilitant les mises en relation.
Elles contribuent à créer un pont, en orientant des utilisateurs parfois plus prêts, plus clairs sur leur difficulté, vers un suivi humain adapté.
La diversité des outils en santé mentale : de l’application standardisée à l’accompagnement ultra personnalisé
Rappelons que l’usage d’outils numériques pour améliorer la santé mentale n’a pas attendu l’arrivée de l’intelligence artificielle. Depuis plusieurs années, des millions de personnes utilisent des applications proposant des exercices de relaxation, de méditation, ou des programmes de gestion du stress. On estime par exemple qu’aux États-Unis, 40 % des personnes ayant des problèmes de santé mentale ont recours à des applications sur smartphone (Source : Digital Health). Toutefois, ces solutions restent souvent standardisées : elles proposent les mêmes contenus à tous, sans réelle adaptation aux spécificités individuelles. L’intelligence artificielle conversationnelle change profondément cette approche. Elle introduit un dialogue dynamique qui s’adapte en temps réel aux réponses et émotions de l’utilisateur, permettant ainsi une interaction bien plus personnalisée. Encore faut-il que cette IA ne se limite pas à formuler des banalités ou à simuler une empathie de suface. Certaines solutions, trop génériques ou mal calibrées, peuvent donner l’illusion d’une écoute, sans réelle profondeur ni progression. À l’inverse, une IA conçue avec un cadre thérapeutique rigoureux, nourrie d’une méthode solide, peut guider efficacement une réflexion personnelle et proposer un accompagnement cohérent.
C’est toute la différence entre recevoir une liste d’exercices impersonnelle et être accompagné dans une démarche construite autour de sa propre situation.
Pour conclure...
Non, l'intelligence artificielle ne remplacera pas les psychologues. Elle enrichit les modes d'accompagnement mental, en rendant accessibles des outils efficaces, à tout moment et pour tous. Elle ouvre aussi de nouvelles voies, en particulier pour celles et ceux qui cherchent une aide rapide, discrète, structurée, centrée sur la résolution de problèmes.
Le choix de l’outil dépend du besoin. Si l’on cherche un lien ou une présence humaine, l’IA n’a pas vocation à remplir ce rôle. Si l’on cherche des clés, une compréhension nouvelle de sa situation, des expériences concrètes pour tester autre chose, alors une IA spécialisée peut être un excellent point d’appui.
Chez Hello Palo notre démarche est responsable : nous cadrons les usages de l’IA, nous définissons clairement ses champs d’intervention, et nous encourageons le recours à un thérapeute lorsque la situation le nécessite.
Nous croyons à une alliance saine et équilibrée, où l’IA reste un outil et jamais une fin en soi. C’est selon nous cette complémentarité entre expertise humaine et capacités technologiques qui permettra de relever les défis actuels de la santé psychologique.


